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Louise Bruit-Zaidman, Les Grecs et leurs dieux, coll. « U », Armand Colin, Paris, 2005, 198 pages

 

Les Grecs et leurs dieux est le troisième ouvrage de Louise BRUIT-ZAIDMAN, membre de l’équipe Phéacie de Paris I-Paris VII qui travaille sur les pratiques culturelles dans les sociétés grecque et romaine. Cet ouvrage se situe à mi-chemin des deux précédents publiés par l’auteur, l’un très général écrit en collaboration avec Pauline SCHMITT-PANTEL à l’occasion d’une question d’agrégation (La Religion grecque, 3ème éd., Armand Colin, Paris, 2004), l’autre très pointu portant sur la piété (Le Commerce des dieux : Eusebeia, essai sur la piété grecque antique, La Découverte, Paris, 2001).

L’ouvrage comporte un apparat critique habituel mais, curieusement, pas de conclusion : l’auteur paie l’absence d’une définition préalable et claire de son champ d’étude, aussi bien sur les plans chronologique (essentiellement les VIe-IVe siècles) que géographique (essentiellement l’Attique et les grands sanctuaires) ou thématique. Concernant ce dernier point, si des guillemets entourent « religion grecque » (introduction, p. V), un sort n’est pas fait à cette expression malheureuse sur laquelle j’avais appelé à réfléchir (La Vie religieuse dans les cités grecques aux VIe-Ve-IVe siècles, Ophrys, Paris, 2000, p. 11-15). Il y a aussi un problème de statut des documents présentés : les textes philosophiques de Platon (en particulier ceux concernant les orphiques et la destinée de l’âme, p. 121-125) ne peuvent être mis sur le même plan qu’un décret ou une pièce de théâtre. L’auteur suppose acquise cette distinction plus qu’il ne la rappelle, des étudiants étourdis pouvant confondre l’idéal et la réalité.

Peut-être faudra-t-il aussi penser à harmoniser la transcription du grec : ainsi on trouve « oïkos » p. 1 mais « daimon » p. 88, « psuchè » p. 107 mais « lesché » et « memuêmenai » p. 122, « prothysis » p. 63 mais « chutroi », p. 105… Contre la tendance actuelle à la facilité ne faudra-t-il pas revenir au grec ? On regrettera une autre facilité de langage, en français cette fois, dans le titre du chapitre 7 qui parle malencontreusement de « cultiver les dieux ». Curieuse aussi, l’éviction volontaire d’Olympie qui est opérée au nom d’un argument qui ne convainc pas (« parce qu’il est le plus célèbre », p. VI) : les sanctuaires de Delphes et d’éleusis, ainsi que la fête des Panathénées, auxquels l’ouvrage consacre de nombreuses pages, sont-ils moins célèbres ?

Ces regrets ne sont rien face à l’érudition très sure dont témoigne cet ouvrage d’un grand intérêt dont on saluera la volonté de ne pas céder aux sirènes du comparatisme religieux pour privilégier une compréhension de l’intérieur, ce qui devrait être le but de tout historien. Très intéressante aussi est la démarche qui laisse rapidement la parole aux sources — toutes commentées, et fort bien — après de rapides chapeaux introductifs.

Foisonnant, l’ouvrage s’adressera en priorité à des étudiants de second cycle, mais rendra de bons services pour illustrer un exposé ou un commentaire sur un sujet précis.

 

M. Michel FAUQUIER
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